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1695 il a été nommé au Roi avec distinction ; et pour dire plus, c’est de Mme de Montchevreuil que je le sais. Vous jugez bien, ma très-aimable, de la joie de Mme de Sanzei, qui sait à cette heure que son fils se porte bien ; songez que de douze mille hommes qu’ils étoient dans Namur, il n’en est resté que trois mille trois cents[1]. J’oubliois_ de vous dire que c’est M. de Guiscard[2] qui est venu apprendre à la cour que le maréchal de Boufflers est prisonnier. Mme de Sully a la même maladie que Mme de Grignan[3] ; elle prend des eaux de Forges[4], dont elle se trouve à merveilles ; mais Forges est un peu trop

  1. 5. Voyez ci-dessus, p. 295 et note 2.
  2. 6. Louis de Guiscard, chevalier, comte de la Bourlie, marquis de Magny, fils· de Georges de Guiscard et de Geneviève de Longueval, dame de Foudrinoi en Picardie. Il était né le 27 septembre 1651, devint lieutenant général, reçut l’ordre le 1er janvier 1696 pour son héroïque conduite à Namur, fut ambassadeur en Suède en 1698, partagea la disgrâce du maréchal de Villeroi, et mourut le 10 décembre 1720. Il avait épousé Angélique de Langlée, dont il n’eut qu’une fille, mariée au marquis de Villequier, fils aîné du duc d’Aumont. « Guiscard, dit Saint-Simon (tome XVIII, p. 73 et 74), étoit bon homme, honnête homme, doux et d’un commerce agréable et fort honorable. Avec ses biens, son cordon bleu, ses amis, car il en avoit, l’alliance de sa fille, il se pouvoit passer de la cour et mener une vie agréable ; mais il avoit de l'honneur et de l’ambition... La mort du Roi et le brillant du maréchal de Villeroi dans la Régence avoient fait renaître ses espérances... Voyant enfin qu’on ne songeoit à lui pour rien, il se retira tout à fait en Picardie auprès de Chaulnes, dans une terre qui s’appeloit Magny, à qui il avoit fait donner le nom de Guiscard, dont il avoit rendu la demeure fort agréable. La mélancolie l’y gagna de plus en plus... Il ne lui paroissoit ni fièvre ni aucun autre mal, et cependant gardoit son lit. Sa fille, au bout de quelques jours, le pressa de se lever ; il lui répondit que ce n’étoit plus la peine, et lui tint quelques discours ambigus. La conclusion fut que, sans nul accident qui parût, il mourut le soir de ce même jour, à soixante-onze ou douze ans. »
  3. 7. Voyez la lettre du 20 septembre suivant, p. 314.
  4. 8. En Normandie : voyez tome II, p. 317, note 5.