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1695

*1423. — DE CHARLES DE SÉVIGNÉ À ***[1].

À Nantes, ce 9e juillet 1695.

Monsieur l’abbé de Boylesve est en cette ville, Monsieur ; il m’a fait l’honneur de me venir voir : je lui ai rendu toutes les civilités qui sont dues à un homme de son mérite ; et l’amitié qu’il m’a dit qui est entre vous et lui a beaucoup augmenté mon penchant naturel. Il m’a parlé de l’affaire nouvelle qui est entre M. de Morveaux et moi. Je lui ai répondu en termes très-honnêtes, mais aussi très-précis et très-propres à ôter tous les doutes qui lui pourroient être venus dans l’esprit que je me départisse d’aucuns droits de ma charge. Je crois que celui qui sera chargé du soin de faire son panégyrique oubliera de dire avec quelle facilité il reçoit toutes les impressions de M. de Morveaux. Apparemment la vivacité avec laquelle M. de Morveaux lui a dit ses raisons a produit tout son effet et l’a entièrement persuadé. Pour moi, j’ai été un peu plus rebelle, et je vous avoue que j’ai eu beaucoup plus d’envie de rire que de me fâcher quand il m’a assuré que M. de Morveaux avoit quelque raison de me disputer que je fusse officier général : c’est proprement en ces occasions qu’on peut dire que qui prouve trop ne prouve rien. Il m’a dit de plus que_M. de Morveaux étoit dans une longue possession : je lui ai répondu que si M. de Morveaux vouloit faire présentement ce qu’il a fait à propos ou non depuis vingt ans, je n’avois qu’à m’en retourner à Paris, et que je n’aurois point de charge. Il a fini par me dire que nous n’aurions point de décision de la cour, et j’ai fini aussi de mon côté en lui disant

  1. Lettre 1423 (revue sur l’autographe inédit). — 1. Cette lettre, dont la suscription manque, est sans doute adressée à Lamoignon, comme celle du 25 juin précédent : voyez ci-dessus, p. 290.