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1695 langes  ; je lui conseille Carette ou Vichy : il ne faut point laisser prendre possession de nos pauvres machines à des maux si dangereux et si douloureux. Si l’on peut passer d’un discours si triste à une bagatelle que vous avez mandèe à Pauline, je vous dirai que nous en avons senti tout le sel ; il nous sembloit que Mme Cornuel étoit ressuscitée[1], ou qu’elle l’avoit mande de l’autre monde. Pour moi, j’en ferois un vrai compliment à M. de Poissy, si j’avois eu seulement l’honneur de le voir deux fois en ma vie ; mais il peut s’assurer de nos admirations secrètes. « Ah ! masques, je vous connois, » en voyant entrer de certaines gens annoncés sous de grands noms : comment cette pensée si naturelle, et qui paroît si simple, ne m’est —elle point venue mille fois, à moi qui hais mortellement les grands noms sur de petits sujets ? J’admire l’humilité de ceux qui veulent bien les porter ; ils les refuseroient, s’ils avoient l’esprit de faire réflexion à ce que leur coûte l’explication de ces beaux noms, et comme elle tombe tout en outrage sur leurs pauvres petits noms, à quoi l’on ne penseroit pas, s’ils n’avoient point voulu prendre les plumes du paon, qui leur conviennent si peu[2]. J’espère que ce mot empêchera dans l’avenir ces sortes d’usurpations, et les pourra corriger, comme Molière a corrigé tant de ridicules ; Dieu le veuille, et que chacun craigne qu’on ne lui puisse dire : « Masque, je vous connois ! » Mon cousin, vous ne doutez pas que nous n’ayons reçu avec votre lettre tout l’entêtement qu’il nous a paru que vous aviez de ce mot, que je vous supplie de mettre à la tête de tous ceux que M. du Bellai[3]

  1. Lettre 1416. — 1. Elle était morte au mois de février 1694. Voyez tome IX, p. 90, note 16.
  2. 2. Voyez la lettre suivante, p. 283
  3. 3. Est-ce le du Bellai dont il a déjà été question tome VIII, p. 319, et note 4·