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time que nous avons toujours conservée pour vous. Sur cela je mesure vos sentiments par les miens, et je juge que ne vous ayant point oublié, vous ne devez pas aussi nous avoir oubliées. J’y joins même M. de Grignan, dont les dates sont encore plus anciennes que les nôtres. Je rassemble toutes ces choses, et de tout côté je me trouve offensée ; je m’en plains ici ; je m’en plains à vos amis, je m’en plains à notre cher Corbinelli, confident jaloux et témoin de toute l’estime et l’amitié que nous avons pour vous ; et enfin je m’en plains à vous-même, Monsieur. D’où vient ce silence ? est-ce de l’oubli ? est-ce une parfaite indifférence ? Je ne sais : que voulez-vous que je pense ? À quoi ressemble votre conduite ? donnez-y un nom, Monsieur. Voilà le procès en état d’être jugé, jugez-le : je consens que vous soyez juge et partie.


1695

1415. — DE COULANGES À MESDAMES DE SÉVIGNÉ ET DE GRIGNAN.

À Paris, le 10e juin.

Elle est tombée au beau milieu de Saint-Martin, cette dernière aimable lettre ; et comme elle n’a point été lettre close pour mon charmant cardinal, qui a pris la place et au delà du charmant marquis, elle a donné une ample matière pour parler de la mère et de la fille, et pour reparler de ce royal château, et de la bonne et grande réception qu’on y fit à ce cardinal à son retour de Rome[1]. En parlant de vous, Mesdames, combien de fois vous

  1. Lettre 1415. — 1. Le cardinal de Bouillon, en revenant de Rome au mois d’octobre 1691, avait passé quelques jours à Grignan avec le duc de Chaulnes et Coulanges. Voyez les Mémoires de Coulanges, p. 310.