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1694 Êtes-vous à la noce ? y serez-vous bientôt ? Je veux savoir ce qui vous regarde tous, parce que j’y prends un véritable intérêt. Toute la troupe de Tonnerre est revenue dans une parfaite santé. M. de Coulanges a trouvé une grande affliction à son retour : il paroît dans le monde un livre imprimé de ses chansons[1], et à la tête de ce livre, un éloge admirable de sa personne : on dit qu’il est né pour les choses solides et pour les frivoles, on montre les preuves des dernières ; il est très—touché de cette aventure, que j’ai encore aggravée par ne la pouvoir prendre sérieusement : à tout cela je réponds : chansons, chansons. Il est allé à Versailles, et de là à Saint-Martin[2]. Il faut espérer qu’il se consolera d’avoir fait ce livre par en faire un second, avant que sa jeunesse se passe. Vous voulez que je vous dise des nouvelles de ma santé, mon amie ? elle n’est en vérité point bonne : Carette me donne tout ce qu’il veut, et j’avale ses remèdes sans confiance et sans succès ; mais je crois que ce seroit encore pis de changer tous les jours de médecin : il faut prendre

  1. Lettre 1393. — 1. L’Achevé d’imprimer est du 15 novembre 1694. Le livre est intitulé : Recueil de chansons choisies, divisé en deux parties. À Paris, chez Simon Benard, 1694. On lit dans l’avertissement du libraire au lecteur : « Il n’est pas nécessaire de nommer ici l’auteur dont je parle : personne n’ignore que c’est le fameux Monsieur de C… si connu par le talent rare qu’il a pour ces sortes d’ouvrages, et qui l’a rendu les délices de tout ce qu’il y a de gens de bon goût à la cour et à la ville… Monsieur de C… donc est un homme capable de tout, mais qui a préféré aux autres talents qu’il avoit et dont il pouvoit se servir avantageusement dans le monde, celui de la poésie. L’événement fait voir qu’il ne s’est pas trompé ; car enfin toute autre occupation lui auroit attiré plus de peine et moins de gloire. Il a l’esprit solide et agréable en même temps ; personne ne conte et ne raille plus finement que lui ; il est capable des conversations les plus sérieuses et les plus enjouées où il réussit toujours également bien, etc. »
  2. 2. À Saint—Martin de Pontoise, résidence du cardinal de Bouillon.