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vous remets, ma très-belle, tous mes compliments pour les distribuer, et je vous supplie de n’épargner aucuns termes pour bien faire connoître tous les sentiments de mon cœur et de mon âme. Je ne suis point content de la santé de Mme de Coulanges : je l’ai retrouvée avec ses maux d’estomac et ses justes craintes de ne point rattraper son premier état ; elle continue les remèdes de Carette ; Dieu veuille qu’elle s’en trouve mieux qu’elle n’a fait jusques ici ! mais, selon toutes les apparences, elle ne pourra pas se dispenser d’aller à Bourbon ce printemps. Je suis très en peine d’elle, et son état trouble bien la perfection du mien ; car je me porte à merveilles et de corps et d’esprit ; mais gare la goutte, qui me prit si vilainement le 20e décembre de l’année passée ! Adieu, ma très-belle : je suis mille fois plus à vous qu’à moi-même. La maréchale de Villeroi vous prie de trouver bon que tous ses compliments pour vous, et pour tout ce qui s’appelle Grignan, passent par mon canal : elle n’est pas écriveuse de son naturel, mais elle sait penser et parler comme si elle écrivoit. Vous devez être assurément très-contente de la manière dont elle parle de tout ce qui vous regarde, et de la chaleur avec laquelle elle relève les sottises et les dits du vulgaire.



1393. — DE MADAME DE COULANGES À MADAME DE SÉVIGNÉ.

À Paris, le 19e novembre.

Il y a quinze jours, mon amie, que je ne vous ai écrit ; je vous en avertis, de peur que vous ne vous en aperceviez pas. Je n’avois point reçu de vos lettres, et cela me faisoit craindre que vous ne voulussiez plus les miennes.