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1694

1391. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE COULANGES.

À Grignan, le 16e novembre.

Je ne sais, Madame, où cette lettre que je vous adresse trouvera présentement mon cousin : la voilà, toute pleine de bagatelles bien indignes des relations qu’il nous fait tous les jours de son voyage. Je ne sais si vous vous souvenez de votre dernière lettre, et avec quel agrément et quelle politesse, vous vous excusez d’avoir montré une des miennes, et comme vous m’assurez que puisque le monde n’en a point vu, c’est signe que je n’ai point écrit, et tout ce que vous me dites sur cela ; je voudrois en être digne, mon amie, et je vous plains de ne point recevoir de vos lettres : voilà tout ce que je vous puis dire. Je crois que rien ne peut plus empêcher que nous ne fassions notre mariage ; tout enfin est réglé, il me paroît que tous les acteurs nécessaires à cette cérémonie s’assembleront de tous côtés entre ci et quinze jours. M. de Grignan a eu des étourdissements qui nous ont fait peur, à cause de l’horrible chute qu’il a faite[1] ; ce fut un miracle qu’il n’eut pas la tête cassée, et le vingt-unième jour il eut les vapeurs que je vous dis ; mais on nous assure que ce n’est rien. Il vous fait mille et mille compliments ; il disoit l’autre jour qu’il vouloit vous écrire, je lui ai promis de vous le mander. Adieu, ma très-aimable amie : quand je ne vous nomme point Pauline, c’est ma faute ; car elle est toujours vive sur votre sujet, et sent votre esprit et vos lettres d’une manière qui fait son éloge ; elle vous conjure de ne la pas oublier.

  1. Lettre 1391 — 1. Voyez ci—dessus, p. 199, la lettre du 14 octobre précédent.