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marquis[1] une tabatière d’or, pesant deux cents écus, et coûtant dix louis de façon, sous prétexte qu’elle avoit du tabac meilleur que le sien. Le Marquis n’a pas daigné seulement l’en venir remercier, et a publié qu’elle lui avoit fait un présent où il y avoit plus d’invention que de magnificence ; il prétend lui avoir donné pour deux cent cinquante pistoles de bouteilles[2] ; jamais il n’y eut un homme plus extravagant, et Mme de Coulanges est bien heureuse d’en être défaite. Je la quitte avec quelque repos, par le bon état où je la laisse. Adieu, mon aimable gouvernante : je m’en vais être plus près de vous de quarante-cinq lieues, et dans le voisinage de Bourbilly, si je ne me trompe ; je trouverai peut-être les bois de Chantal[3] sur mon chemin, et ils me feront plaisir, quand je les entendrai nommer. Je vous embrasse, ma belle Madame, avec une tendresse infinie. Écrivez-moi toujours, quand cela vous conviendra ; j’ai prié Mme de Coulanges de m’envoyer toutes vos lettres : ainsi ne nous séparez point, cela seroit inutile, puisque les siennes me viendront, après qu’elle les aura lues.



1386. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À COULANGES.

À Grignan, le 9e septembre.

J’ai reçu plusieurs de vos lettres, mon cher cousin ; il n’y en a point de perdues : ce seroit grand dommage ;

  1. 9. Carette, son médecin. Voyez p. 162, note 9, et p. 168, note 3.
  2. 10. De son élixir.
  3. 11. Le château de Chantal était dans la paroisse de Monthelon près d’Autun (voyez Walckenaer, tome I, p. 3, et notre tome IV, p. 13, note 20) ; mais d’autres bois que ceux du château pouvaient porter ce nom, soit autour de Bourbilly, soit ailleurs.