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1694 nera moyen d’acquérir aux portes de Paris une maison plus convenable pour elle et pour les compagnies qu’elle veut voir, et moins exposée à celles dont elle se passeroit à merveilles ; et je ne trouve pas qu’elle ait tort. Cependant, je lui conseille fort de prendre le temps comme il vient, et de s’accommoder autant qu’elle pourra des incommodités de Meudon. Elle a même eu contentement ce voyage-ci ; car elle n’y a eu précisément que les gens qu’elle y vouloit avoir. Nous en revînmes samedi au soir, pour assister dimanche au dernier acte de philosophie du joli abbé de Villeroi[1], qui fit des merveilles, et où il se trouva bonne et nombreuse compagnie en haut et en bas ; car présentement les dames viennent aux actes ; et la maréchale de Villeroi donna une belle et magnifique collation à toutes celles qu’elle y avoit invitées. Mais parlons d’autres choses. J’espérois à mon retour trouver Mme de Coulanges dans le bon train où je l’avois laissée ; elle avoit même été d’une fête à Lestang chez M. de Barbesieux il n’y a que huit jours, où je l’avois vue, et d’où elle étoit revenue à Paris sur les deux heures après minuit, sans qu’elle s’en fût trouvée mal. Il est vrai, Madame, qu’au lieu de la retrouver avec le même visage, je l’ai trouvée dans le dernier changement, causé par un grand dérangement, et une insomnie extraordinaire, nonobstant quoi Carette a voulu la faire baigner ; ce qui l’a réduite en tel état, et son pauvre estomac s’en est trouvé si affoibli, que Carette lui-même a suspendu quant à présent les bains et les gouttes même ; elle ne digère plus, elle rend le peu qu’elle mange sans appétit, tout comme elle le prend ; en un mot, elle ne sait plus où

  1. 2. François-Paul de Neufville de Villeroi, abbé de Fécamp, né en 1677, archevêque de Lyon en 1714, mort le 6 février 1731. Il avait alors dix-sept ans.