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bonheur de cette vie. Vous ne me dites rien de vous, mon cher cousin ; pensez-vous que votre santé et votre joie me soient indifférentes ? M. de Grignan est vers Nice avec un gros corps de troupes, pour repousser en cas d’alarmes cette flotte si mal reçue à Brest[1]. Vous savez comme Messieurs les lieutenants généraux des provinces sont présentement lieutenants généraux des armées ; cela les charme et les ruine. Nous avons toujours ici quelqu’un qui passe et joue à l’hombre ; on lit, on est dans sa chambre ; enfin les jours passent. Notre petite troupe vous aime et vous embrasse.



* 1382. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À LA COMTESSE DE GUITAUT.

À Grignan, 20e juillet 94[2].

Je suis plus près de vous ici, Madame, que je n’étois à Paris ; il faut cependant que cette lettre y retourne pour aller sûrement à vous. Je partis le 11e de mai, j’arrivai à Lyon le onzième jour, je m’y reposai trois jours, je m’embarquai sur le Rhône, et je trouvai le lendemain, sur le bord de ce beau fleuve, ma fille et M. de Grignan, qui me reçurent si bien, et m’amenèrent dans un pays si différent de celui que je quittois et où j’avois passé, que je crus[3]être dans un château enchanté. Enfin, Ma-

  1. 4. L’amiral anglais Russell avait passé de la Manche dans la Méditerranée, pour rallier les escadres espagnoles et protéger les côtes d’Espagne. Voyez ci-après, p. 193, note 3.
  2. Lettre 1382 (revue sur l’autographe). — 1. Dans la dernière édition avant la nôtre, cette lettre a été datée, nous ne savons pourquoi, du 10 mars : voyez plus bas la note 9.
  3. 2. Mme de Sévigné avait d’abord écrit crois, puis elle l’a corrigé en crus.