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1694 ont tous été tués ou noyés, et l’on prétend qu’un milord considérable, chef de l’entreprise, y a péri tout des premiers ; Langeron a fait des merveilles en cette occasion. Je ne doute pas que cette tentative des ennemis n’ait donné par plus d’une raison de l’inquiétude à nos amis[1] qui sont toujours à Saint-Malo ; mais s’il est vrai que la flotte ait levé l’ancre, comme on dit, ils n’auront point le dégoût de voir venir les troupes de Normandie à leur secours ; Dieu veuille qu’ils n’en aient aucun besoin ! car comme nous connoissons le mari et la femme, le diable seroit bien aux vaches[2]. L’abbé Têtu est toujours fort extraordinaire ; il a loué une maison dans la rue Neuve-Saint-Paul. Voilà, ma belle gouvernante, toutes nos nouvelles, au moins les miennes ; car je ne sais jamais que fort grossièrement le sujet de la pièce. La maréchale de Villeroi, qui est ici, sachant que je venois de vous écrire, m’a prié de vous dire toujours mille belles et bonnes choses de sa part ; elle est très-assidue auprès de Mme de Coulanges, qu’elle aime de plus en plus, et dont elle est en peine ; je n’ai jamais vu une meilleure femme, ni plus digne d’être honorée et aimée. Je fus hier chez Mme de Lesdiguières, qui me fait enfin espérer son portrait ; mais il ne sera pas avec ses accompagnements, comme celui qui se débite dans les tabatières : quelque charitable personne ne vous en auroit-elle point envoyé quelqu’une à Grignan ? Il n’est rien de plus scandaleux que ces sortes de boîtes, et l’on en cherche les peintres avec attention pour en faire justice. Adieu, ma très-aimable gouvernante.

    de l’infanterie angloise et irlandoise, qui commandoit ce débarquement, y a été tué. » (Journal de Dangeau, 22 juin 1694.)

  1. 12. Le duc et la duchesse de Chaulnes,
  2. 13. « Le diable est aux vaches, pour dire que tout est en trouble, en confusion. » (Dictionnaire de Furetière.)