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1694 la Rue[1] à Saint-Paul ? C’est pourtant un jésuite qui a fort contenté les courtisans à Versailles[2]. Si vous ne voulez pas, et que vous aimiez mieux un de vos chanoines, ou M. Nicole, ou M. Letourneur[3], faites-moi donc tenir ici deux mille francs que mon fermier me garde entre ses mains, et qu’il n’ose confier aux marchands de Semur, qui n’osent plus se fier à ceux de Paris, et qui savent que présentement, sans aucune pudeur, on refuse ainsi toutes les lettres de change. Ces vendeurs de moutons sont des vilains qui m’ont fait enrager, et je ne puis pas même attendre jusqu’à Pâques, car mes besoins sont aussi pressants que ceux des pauvres à qui je donne du blé. Que ferai-je donc, ma chère Madame ? Vous êtes mon secours en toutes occasions : ne pouvez-vous point, vous qui savez que mon argent est là, me le faire donner ici par le moyen de M. de Caumartin ? Que sais-je ce que je dis ! Enfin, Madame, ayez pitié de moi, consolez-moi au moins, exhortez-moi au jeûne, afin de diminuer mes besoins. Je vous envoie M. Boucard, pour trouver quelque remède prompt à mes peines. Je suis absolument à vous, plus entêtée de votre mérite que jamais, par la connoissance que j’ai des autres femmes. Enfin, vous me paroissez comme il n’y en a point.

Mon curé est-il content de mon obéissance ?

    francs, et après celle du 12 février de la même année (p. 136), où elle obéit au curé en donnant les vingt boisseaux. Dans la dernière édition avant la nôtre, on l’a placée au mois de février 1693.

  1. 2. Charles de la Rue, né à Paris en 1643, mort en 1725. On a de lui quatre volumes de sermons, quatre volumes de panégyriques ou oraisons funèbres, et des éditions estimées de Virgile et d’Horace. Il fut confesseur de la duchesse de Bourgogne. Saint-Simon (tome I, p. 432) l’appelle un « jésuite de tous points. » — Le carême commença cette année-là le 24 février.
  2. 3. Le P. de la Rue avait prêché le carême à Versailles en 1693.
  3. 4. Voyez ci-dessus, p. 106, note 5.