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Je ne puis vous dire, ma chère Madame, la honte que j’ai, malgré tout ce que vous me mandez, de vous parler de mes misérables affaires. Hébert me mandoit la dernière fois qu’elles vous avoient bien rompu la tête ; et comme j’aime et honore cette tête, et que je sais combien vous en avez abusé, je ne puis souffrir qu’elle reçoive encore le moindre épuisement pour mes intérêts. J’envoie à Boucard un petit mémoire de mon aimable Rochon[1], dont je ménage la tête et la poitrine aussi. Il conseille une compensation que vous verrez, et que je trouve fort juste. Je ne blâme point Hébert de ce qu’il a prêté au meunier pour semer ; mais je désapprouve fort qu’il donne tant de temps et de patience au meunier, qui est mauvais payeur : il ne devroit pas, pour cela seul, avoir une si grande complaisance pour Boucard. Je vous avoue enfin, Madame, que je suis ravie de n’avoir plus de receveur : je n’ai pas reçu 2200tt de ma terre chaque année ; et même cette dernière année que les grains sont chers, je ne m’en serois pas trop sentie : je hais cette manière de payement, encore plus les continuelles contestations de Boucard et de lui ; cela me déplaît. Nous avons joint la fin de son compte avec cette dernière année : il faut finir, ma chère Madame, et n’en entendre jamais parler. S’il venoit ici, comme il me l’offre, je ne regarderois pas son compte : c’est dans le pays et sur les lieux qu’il faut l’arrêter, et se tirer de ce vilain détail. Ordonnez à Boucard de le finir ; et si Hébert ne veut pas l’en croire, priez M. Manin[2]d’y entrer pour y mettre la conclusion ; il le voudra bien à votre prière, et je crois même qu’il ne sera pas fâché de me faire ce plaisir. Je vous assure que je signerai ce qu’ils auront tous deux signé ;

  1. 4. Voyez ci-dessous, p. 130, un billet de Rochon.
  2. 5. Voyez tome V, p. 557.