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1693

* 1355. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À LA COMTESSE DE GUITAUT.

Paris, vendredi 5e février[1].

Je sais, Madame, que vous vous portez bien, et Dieu sait comme je vais abuser de votre tête. Je vous envoie une lettre de mon ministre Boucard ; vous y verrez une telle résignation dans la perte qu’il a faite de sa fille, que cela vous disposera à écouter ses raisons. Il est toujours persuadé qu’Hébert ne me fait pas toucher tout l’argent qu’il pourroit me faire tenir présentement ; il est persuadé qu’il devroit vendre tous nos grains, et qu’il devroit donner des connoissances à mon nouvel amodiateur, qui lui sont nécessaires pour commencer à prendre possession ; il voudroit encore qu’il lui fit place pour se loger dans le château : cela me paroît juste, mais je voudrois aussi que jusqu’à ce qu’Hébert m’ait tout à fait payée, il pût demeurer dans une autre chambre que celle que doit habiter l’amodiateur, et qu’ils fussent tous deux assez raisonnables pour être quelque temps ainsi, logés ensemble. C’est à vous à ordonner, ma chère Madame, car je les renvoie tous à vos ordres. C’est, en vérité, une charité que de me tirer de ce pas embarrassé, et de me mettre dans la route ordinaire de l’amodiation. Hébert me doit toute l’année 92 : je n’ai pas encore reçu les 1 500tt qu’il me fait payer ici[2], du reste de 91. Toute cette conduite si lente est tout à fait propre à faire mourir de faim. Faites-vous soulager par M. Gautier, qui voudra bien prendre pour moi toutes ces peines, afin que vous n’ayez qu’à commander.

  1. Lettre 1356 (revue sur l’autographe). — 1. Mme de Sévigné s’est trompée sur la date. Le 5 février de cette année-là était un jeudi.
  2. 2. Voyez la lettre précédente, p. 100 et 101.