de déployer tous ses agréments pour conquérir, par un mariage avec sa cousine, « un bien qui accommodait fort le sien. »
Il est certain que pour un homme qui cherchait, comme il le
dit, de la subsistance dans le mariage, une dot de cent mille
écus eût bien fait ; et il savait qu’il eût trouvé dans une alliance avec mademoiselle de Chantal d’autres biens qu’il n’était
pas assez sot pour dédaigner. Mais il manqua l’occasion. Il
prétend que, s’il ne donna pas suite aux projets de son père,
c’est qu’il fut effrayé par certaine manière étourdie dont il
voyait agir mademoiselle de Chantal, et « qu’il la trouvait la
plus jolie fille du monde pour être la femme d’un autre. » Ces
craintes délicates de Bussy nous sont un peu suspectes ; et il
serait étonnant d’ailleurs que sa cousine ne lui eût pas inspiré
dès lors plus d’estime qu’il ne le dit. Nous sommes porté à
croire cependant que dans le petit chef-d’œuvre d’adroite médisance où il parle ainsi, il doit, à une ou deux calomnies près,
y avoir sous chaque méchanceté, sons chaque exagération, une
certaine part de vérité. Il est probable que Marie de Chantal, à
cet âge de seize à dix-sept ans qu’elle avait quand il put songer
à l’épouser, laissait déjà librement éclater cette humeur gaie
et folâtre, cette joie et ces agréments, qui furent toujours, au
témoignage de Bussy lui-même, compatibles avec la vertu[1].
Mademoiselle de Chantal put rendre grâce à son enjouement,
si en effet il effaroucha Bussy. Celui-ci, en avril 1643, épousa
une autre petite-fille de sainte Chantal, Gabrielle de Toulongeon, qui ne trouva pas en lui un mari très fidèle, et qu’il
perdit trois ans après.
Pour avoir échappé à Bussy, Marie de Chantal ne rencontra pas ailleurs, il est vrai, de beaucoup meilleures conditions de bonheur. Mais l’union qu’elle contracta fut du moins de courte durée, et après lui avoir causé quelque chagrin, devait, très jeune encore, la laisser libre et, pour le reste de sa vie, tout entière aux jouissances de l’amour maternel le plus tendre et le plus exalté.
Le fameux archevêque de Corinthe et coadjuteur de Paris, Gondi, qui devint par la suite un des plus chers et des plus fi-
- ↑ Il avait écrit ces mots sous un portrait de madame de Sévigné placé dans son salon.