* 95. — DE MADAME DE GRIGNAN AU COMTE
DE BUSSY RABUTIN[1].
Je ne me suis nullement plainte du peu de régularité que vous avez eue quand je me suis mariée, et je ne sais pourquoi vous prenez soin de vous justifier. Je suis fort sure que vous avez pour moi les sentiments d’un bon parent et d’un ami ; je compte si fort là-dessus que j’ai pensé vous écrire un remercîment de la bonté que vous avez de vous intéresser si tendrement à ce qui m’arrive.
Ainsi vous pouvez ne vous pas contraindre et ne me donner des marques de votre souvenir que quand vous en aurez fort envie : je les recevrai toujours avec joie.
M. de Grignan ne vous a point écrit, et bien loin de comprendre qu’il dût commencer, il a trouvé très-mauvais que vous n’ayez pas daigné lui faire un compliment : parce qu’il s’est trouvé si heureux qu’il croyoit tout le monde obligé de le féliciter. Voilà des raisons, et je suis assez vaine pour être bien aise de vous les dire moi-même[2].
- ↑ Lettre 95. — i. C’est la réponse à la lettre que Bussy, un peu plus haut (n° 93), promettait d’écrire à Mme de Grignan.
- ↑ Bussy accompagne ces deux lettres (94 et 95) des réflexions suivantes, dans le tome III de ses Mémoires manuscrits, d’où est tiré ce billet inédit de Mme de Grignan : « Ces deux lettres me parurent fort aigres, et je n’en trouvai point d’autre raison, sinon que je m’étois moqué dans ma lettre à Mme de Sévigné (no 93) de l’inci-
était accouchée au mois de mai à Paris, où elle était venue solliciter pour son mari. Ce petit Rabutin, le second fils de Bussy, était Michel-Celse-Roger de Rabutin, comte de Bussy, qui devint en 1724 évêque de Luçon, membre de l’Académie française en 1732, et mourut en 1736. — Mme de Montmorency, dans une lettre du 1er juin, fait aussi compliment à Bussy de sa fille. Il en eut cinq de ses deux femmes ; nous ne savons quelle était celle qui avait accompagné Mme de Bussy à Paris. Voyez la Généalogie, p. 342 et 343.