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d’autant plus curieux et suggestif que le Remorqueur est daté de 1841, la Maison du berger, de 1844, et que Vigny, très probablement, avait lu le poème de Weustenraad.

Oserai-je dire toute ma pensée ? L’auteur oublié du Remorqueur me paraît inaugurer, dans la Belgique issue de la Révolution de 1830, une tradition d’art qui se maintiendra après lui, grâce à la prospérité croissante du nouvel État, et que représenteront, vers la fin du siècle, des artistes plus favorisés et plus glorieux que lui. Verhaeren, dans la Multiple splendeur, chantera l’Effort humain, Meunier sculptera le Monument au travail. Y aurait-il du paradoxe à prétendre que ces deux créateurs, au moment où ils célébreront ainsi l’activité moderne, seront moins inspirés par leur tempérament personnel, par leur sang flamand ou wallon, que par le milieu où ils auront grandi, et, malgré l’absurde et honteux discrédit attaché à cette épithète, ne pourrait-on affirmer que leur œuvre sera belge, magnifiquement et glorieusement belge ?

Du reste, au cas où l’on voudrait conserver à ce dernier adjectif sa fâcheuse acception, les Poésies lyriques de Théodore Weustenraad sont-elles vraiment, dans la forme, assez « belges » pour avoir mérité un complet oubli ?

Certes, l’écrivain, chez Weustenraad, est souvent médiocre. On s’aperçoit trop que le français n’est pas sa langue maternelle. On s’en aperçoit, non pas tant