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« Me sera-t-il maintenant permis, lui dit-il, de m’adresser un instant, non plus au ministre, mais à l’écrivain, à l’homme de goût, à l’ami dont l’accueil cordial m’a vivement touché, et de lui demander un conseil ? Mon petit poème de la Charité obtient un succès que je n’aurais pas osé espérer. Chose inouïe ! On en demande et on en vend à l’étranger ! »

Elle est assez plaisante, cette exclamation d’un écrivain étonné de son propre succès ; mais elle se conçoit aisément. Une pareille vogue était, en effet, sans précédent pour l’œuvre littéraire d’un Belge, et ne devait se renouveler que cinquante ans plus tard.

« Convaincu par ce succès, poursuit ingénûment Weustenraad, que je n’ai pas fait une œuvre tout à fait médiocre, je voudrais en offrir quelques exemplaires à notre bonne et charitable Reine et accompagner cet envoi de quelques vers :

xxxxxxxxxxMadame,

Le Riche vous admire et le Pauvre vous aime.
Sur votre front rayonne un double diadème
xxxxxxAussi brillant que respecté.
Aux yeux des nations reine par la puissance,
Vous êtes Reine encore aux yeux de l’Indigence
xxxxxxPar votre noble charité.

Madame, au nom sauveur du Dieu qui vous regarde,
Je confie à votre âme et mets sous votre garde
xxxxxxCe doux poème du malheur.
Français, je l’eusse offert à votre Sainte Mère ;[1]
Belge, je l’offre à vous, sa fille la plus chère,

xxxxxxMais c’est toujours au même cœur.
  1. La reine Amélie, femme du roi Louis-Philippe.