Page:Séverin - Théodore Weustenraad, poète belge, 1914.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui, désolent l’État en 1846 : Rapacité, corruption, vénalité des pouvoirs… Incapacité des chefs militaires… Égoïsme et orgueil des classes dirigeantes, sourdes aux revendications populaires… Ingérence du clergé dans les affaires publiques… Attentats médités par l’étranger contre les libertés belges… Certaines de ces plaintes sont bien graves, et il serait intéressant de rechercher dans l’histoire détaillée du temps les faits qui les motivèrent.

Il faut probablement faire ici la part de l’exagération passionnée, fréquente chez l’homme de parti. De plus, la Révolution de 1830, en donnant à notre pays l’existence politique, avait sans doute mis dans le cœur de beaucoup de Belges des illusions naïves et généreuses dont l’expérience devait démontrer la vanité. Rien d’humain n’est parfait. Pour se consoler, les Belges n’auraient eu qu’à jeter un regard au-delà de leurs frontières.

Au reste, tout chimériques qu’étaient les rêves de 1830, d’immenses progrès ont été réalisés. Le poète ne tarde pas à le reconnaître. Dans un beau mouvement de fierté, il s’adresse à la statue de la Patrie : elle peut annoncer aux morts de 1830, couchés à ses pieds, que leurs fils n’ont pas dégénéré.

Dis-leur qu’un sang viril coule encor dans nos veines,
Que jamais notre bras n’acceptera des chaînes,
Que jamais notre front ne perdra sa fierté,
Que toujours notre cœur battra pour la patrie,