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et pacifique, dans le cadre d’un verdoyant et frais paysage où l’on reconnaît la vallée de la Meuse aux approches de Liège, telle qu’elle dut être vers 1840. Une idéale harmonie y règne entre l’homme, la nature et Dieu. L’ouvrier travaille avec courage parce qu’il sait que le travail est conforme au vœu de la nature et de son Créateur, et il les unit dans une même bénédiction.

Héros de la terrestre fête,

Il entonne un chant fraternel.
Et, quand la forêt le répète
Au mont qui le redit au ciel,
Ravi d’une extase inconnue,
Il croit entendre dans la nue,
Dont les flancs s’ouvrent sans effroi,
La voix sublime de Dieu même
Qui dit à la terre : Je t’aime ;

À l’homme : Aime-la comme moi !

Il y a pour nous, dans ces vers optimistes, une cruelle ironie. Weustenraad ne pouvait prévoir quelle serait un jour la désolation des sites industriels. Il ne se doutait pas davantage des profonds changements que devait amener, dans l’ordre moral, religieux et social, le développement de l’industrie. Assurément, la réalité est moins belle que son rêve.

J’ai cité tantôt Verhaeren. À maintes reprises, l’auteur des Poésies lyriques apparaît comme un précurseur, comme une ébauche, du poète de la Multiple splendeur. Lui aussi, il rejette toute fausse humilité et exalte la grandeur du travail humain :