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de l’esprit humain consistoit précisément à réunir un plus
grand nombre d’idées, s’il conservoit toujours le pouvoir
d’en déterminer exactement les rapports, si rien ne le fatiguoit,
s’il pouvoit tout voir et voir toujours bien, toute
acquisition seroit un accroissement réel ; par cela seul
que nos organes s’exerceroient, ils se perfectionneroient
chaque jour, jusqu’à ce que de grandes révolutions vinssent
briser ce tissu savant de fils innombrables, ce tableau
scrupuleusement réglé, mesuré, compassé.
Mais si c’est le propre de toute chose d’être affoiblie
par trop d’extension, si l’on cesse d’être mâle en devenant
subtil, si l’art, en vieillissant, efface les premières beautés ;
il en sera de la langue comme de ces ouvrages du pinceau
dont une justesse trop finie détruiroit la grace, et, par
des recherches minutieuses, empêcheroit la majesté de
l’ensemble. Dans les compositions les plus importantes,

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le | génie de l’art a coutume de laisser certains traits
indéfinis, et peut-être incorrects, pour que les masses
conservent une harmonie plus imposante. Alors l’imagination
du spectateur ne s’attache point à estimer vainement le
soin trop soutenu de ne tomber dans aucune négligence ;
mais se livrant toute entière à l’admiration pour les grands
effets, elle est encore excitée par cette partie vague et
inconnue des choses, où, comme dans la nature, il reste
des beautés possibles afin que chacun suppose celle qu’il
aime davantage, et qu’il puisse découvrir dans la jouissance
de tous une jouissance qui lui soit personnelle.
S’il en est ainsi de toute imitation, dans la peinture,
dans la musique, dans la langue parlée qui n’est primitivement
qu’une extension de la musique, et dans notre
esprit qui n’est lui-même qu’une sorte de réflexion ou de
copie interne des figures extérieures ; il s’ensuit qu’une
langue commence à s’affoiblir, à se détériorer, lorsqu’a-