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une contrainte intolérable quand une constante habitude,
en facilitant plus encore chaque jour ces mouvemens

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déjà naturels, a rendu comme ineffaçable l’empreinte si
souvent frappée, et changé de simples facultés en un
besoin impérieux.
Dans l’homme livré à la multitude des impulsions
sociales, l’habitude immodérée d’être mu devient une

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passion d’activité dont les suites inévitables seront, ou
l’épuisement des organes si cette passion est constamment
alimentée, ou l’ennui si elle vient enfin à manquer
d’objet.
Dès que le desir de sentir et d’agir est exagéré par

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l’habitude ou par des causes accidentelles, et qu’à l’emploi
nécessaire de ses facultés, l’homme fait succéder leur
emploi extrême, il se donne des lois nouvelles, ou plutôt
il détermine une extension fortuite de ses lois primitives.
Il pouvoit également se livrer ou ne se livrer pas à cette

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pente sédui|sante et dangereuse mais une fois entraîné,
il ne s’arrêtera pas qu’il ne soit précipité. Le voilà avide
d’étendre ses facultés, d’en multiplier les actes, de connoître,
d’atteindre, de pouvoir, de posséder, d’exister
davantage de cette existence sentie, attribut d’un composé

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organisé.
Avide d’alimenter ce besoin immodéré, mais retenu
par la douleur qui le force à un choix, d’abord il repousse
les sensations pénibles ; bientôt il dédaigne celles mêmes
qui ne sont qu’indifférentes, et change en passion ce


    contrainte – 73-7. longue habitude, en facilitant chaque – naturels et en rendant comme – frappée, a changé – en besoins impérieux – 81. cette sorte de passion – 84. Lorsque – 85-6. accidentelles, lorsqu’à l’emploi ordinaire de – 86-7. l’homme en fait – l’emploi – 88. une conséquence fortuite et dangereuse des lois – 90. séduisante ; mais – 91. s’arrêtera point – 93. connoître, de posséder – 96. Pressé d’alimenter – 97. repoussant d’abord le – 98. et dédaignant bientôt celles – 99. indifférentes, il change