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Les maux extrêmes ne peuvent abattre une grande ame ; au
contraire, ils lui rendent toute son énergie. Ce qui l’épuise
insensiblement, et l’entraîne par un effort lent et indirect à
s’abandonner à l’apathie, c’est cette continuité misérable de peines et
d’ennuis qui obsèdent et oppriment chaque jour une vie privée de

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situations énergiques et consumée dans un ordre de choses
contraire à notre nature. Le seul fléau d’une grande ame est la
langueur ; elle deviendroit plus forte en luttant contre un ennemi
puissant : elle n’est vaincue que lorsqu’elle dédaigne de résister.

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SOMMAIRE

DE LA SIXIÈME RÊVERIE


Nos excès physiques et moraux sont des résultats sensibles de
l’extension que nous avons donné à notre principe actif, au besoin

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de sentir et d’agir. Nous aimons les impulsions extrêmes, nous
exagérons tous nos besoins, nous nous livrons avec enthousiasme
à tous les mobiles de la vie.
Des boissons spiritueuses. De leurs effets. Du délire inévitable
qui les fait par-tout adopter.

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Retour nécessaire de toute énergie immodérée, de toute joie
exaltée, de toute ivresse.
L’usage des boissons fermentées et théïformés détruit l’aptitude
au vrai bonheur. Des maux de nerfs.
L’homme a épuisé toute son industrie à détruire voluptueusement

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son être, et cette expérience de tous les siècles est perdue
pour l’aveugle postérité.

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SOMMAIRE

DE LA SEPTIÈME RÊVERIE


Une impulsion est nécessaire à l’être actif, mais des moteurs
multipliés et toujours opposés fatiguent sa vie. Les traces du passé