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- d’embellir ma demeure facile par l’opposition de ces
- Alpes colossales, éternel empire des désastreux hivers.
- Dès que je sentirai fraîchir le vent du Sud-Est, je croirai
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- respirer dans leurs glacières immuables, et au moindre
- bruit lointain, à la chûte des rocs suspendus sur la côte
- voisine, je croirai entendre le vaste écroulement de leurs
- terribles avalanches.
- Il n’est point de site plus fait pour la paix du cœur et
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- le charme de l’imagination, qu’une terre circonscrite qui
- jouit d’un aspect vaste et imposant au sein des ondes
- solitaires. Tel est cet asile peut-être unique dans la populeuse
- Europe. Son horizon, limité vers les frimats polaires,
- s’étend sans bornes sous les feux du Midi, et se prolonge
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- vers l’Orient sur les terres de la Sarinne et de l’Aaar.
- Ces contrées montueuses toutes couvertes de pâturages,
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- de ver|gers abondans, et d’habitations éparses à la manière
- patriarchale, coupées de belles eaux et ombragées de
- forêts pyramidales, s’élèvent fécondes et libres jusqu’à
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- l’amphithéâtre des monts secondaires couronnés par la
- majesté des Alpes. Leurs formes sont sévères et sublimes ;
- cette chaîne peut-être est seule [S 1] sur le globe. Lumineuse
- de tous les reflets de l’aurore et du couchant sur ses neiges
- unies et encroûtées, ou bien, aux ardeurs du Sud,
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- vaporeuse et comme fumante et embrasée sous le voile éthéré,
- elle prolonge sa splendeur des aiguilles de l’Allée-Blanche
- et des dômes du Blumlis-Alp jusqu’aux sommets de
- Sargans et d’Appenzell. L’œil étonné de son immensité,
- croit la voir toute entière dans chacune de ses branches
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- partagées et commandées par le colosse du Mont-Blanc
- et les escarpemens du Pic des Orages. Cent vallées, sou-
- ↑
- On sait que ses vallées profondément creusées, donnent à
- ses aiguilles et à ses glacières une élévation apparente, et une
- aspérité de formes supérieure à celle même des Andes.