Cette page n’a pas encore été corrigée
[140]
NEUVIÈME RÊVERIE
- Malgré le joug des lois et l’effort plus puissant de la
- morale, la terre est universellement affligée par les vices
- de l’homme et les erreurs perpétuées par ces vices [S 1] : on
5
- en a conclu que l’homme étoit né méchant ; d’autres ont
- dit, la nature ne peut avoir fait un être mauvais, et la
- dépravation de l’espèce ne peut se communiquer à l’individu
- avant sa naissance [S 2]. L’homme naît donc bon. Ces
[141]
- deux opinions ont pour base une | même erreur, et c’est
10
- sur un fondement si faux que l’on établit la morale des
- sociétés, et que l’on éternise les misères humaines.
- On est surpris d’abord que la seule science, utile à
- l’homme, soit encore à naître, tandis qu’il a poussé tant
- d’autres connoissances inutiles ou funestes, et qui ne
15
- méritent que le nom d’arts, jusqu’à un point d’élévation
- ou de subtilité, d’industrie et d’érudition, qui sembloit
- inaccessible à nos cinq sens et à notre vie de moins d’un
- siècle. N’auroit-on pu s’attacher avant tout à distinguer
- les vrais besoins de l’homme, et à connoître la nature de
- ↑
- Mais qui originairement ont seules produit les vices réels.
- ↑
- Assertion très-hasardée il paroît évident (surtout dans les
- espèces vivipares) que le petit doit participer aux altérations survenues
- à la nature de la mère. Si donc on pouvoit dire de l’homme
- qu’il naît méchant, cela ne prouveroit point que la nature l’ait
- fait tel.
- ↑
- C, XXe Rêv., p. 124-126 = l. 14-46. 14-5. Nous sommes parvenus, dans des
- connoissances – funestes, à un point – 16. et de subtilité, – 16-7. érudition qu’on eût pu croire inaccessible – 18-33. siècle. Mais