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ce point extrême et dangereux, que nous nous flattons
d’atteindre, quelques similitudes avec l’extrême primitif
où nous étions placés.
Dans l’ordre primitif nous étions susceptibles de peu

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d’affections, et chacune étoit déterminée à son moment
et comme choisie indépendamment de notre volonté, par
les besoins de notre nature.
Dans l’ordre actuel il faut donc trouver et un moyen
de ne recevoir à la fois qu’une impression unique, ou du

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moins très-supérieure à toute autre ; et un moyen de faire
dans les impressions dont nous sommes susceptibles, un
choix toujours conforme à nos besoins, toujours convenable
à notre nature, et dès-lors à notre bonheur.
Ces deux moyens nous restent seuls de retourner en

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quelque sorte à cette situation primitive, même par des
voies éloignées d’elle. L’un, au milieu de la ligne de
déviation, nous y rejette rapidement, mais instantanément ;
l’autre, dans l’excès de cette déviation circulaire,
nous fixant à son terme extrême, nous retient auprès du

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point primitif qui, dans l’orbite des choses, est lié à lui
par cela même qu’il est l’extrême opposé.

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De ces deux voies heureuses qui restent seules à l’homme
des sociétés ; l’une est le vin [S 1] ; l’autre est la philosophie
la plus profonde.


  1. Et tout ce qui produit des effets analogues, comme le café,
    l’opium, etc. L’ivresse (sans excès) ramène à la nature, en forti-

    – 41-2. dangereux, où nous prétendons atteindre – 52. choix conforme à nos besoins, convenable – 53. dès-lors utile à. – 54. deux seuls – restent de – 55. à la situation – 57-9. mais momentanément ; l’autre, nous fixant au terme – 59-60. du premier point qui – 60-1. lié à celui-ci par cela même que ce sont les extrêmes opposés. – 62. voies qui – 63. l’une est infaillible, mais elle est méprisable ; l’autre est moins sûre et pourtant meilleure, c’est la recherche de la sagesse. La première, c’est le vin, l’opium et (suit la n. 1). – N. 1, l. 1-2. analogues. L’ivresse