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pièces, et cherchent à gagner le bord ; d’autres essaient de se sauver à la nage, plusieurs sont abîmés dans les flots. La mère de l’empereur déchire ses vêtements, s’arrache les cheveux et verse un torrent de larmes.

Quand elle voit qu’il ne lui reste plus aucun espoir de salut, frémissant de colère, et vaincue par l’excès des maux : « Voilà donc, ô mon fils ! s’écrie-t-elle, le prix de tant de bienfaits ! Je méritais de monter sur ce vaisseau, je l’avoue, moi qui t’ai mis au monde, moi qui, dans ma tendresse insensée, t’ai donné l’empire et le titre de César. Sors des enfers, ô mon époux ! et repais tes yeux de mon supplice : c’est moi, malheureux prince, qui ai causé ta mort et celle de ton fils. Privée de sépulture, et engloutie sous les flots, je vais te rejoindre aux enfers ; je ne l’ai que trop mérité… »

Les vagues lui ferment la bouche, elle s’enfonce dans l’abîme, et le flot la ramène à sa surface ; elle repousse la mort d’une main tremblante, et succombe à la peine. Mais l’amour des Romains pour elle n’est pas