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tteindrait pas l’ardeur qui me dévore. C’est un feu capable de tarir toutes les sources, de dessécher tous les fleuves. Pourquoi, dieu de l’Erèbe, m’as-tu rendu à Jupiter ? il fallait me garder. Reprends-moi dans tes ténèbres ; montre-moi, dans l’état où je suis, à l’enfer que j’ai vaincu. Je n’emporterai plus rien de ton empire ; pourquoi craindre encore Alcide ? O mort ! saisis-moi sans crainte : maintenant je puis mourir.

Alcmène

Sèche au moins tes larmes, et surmonte la douleur ; montre-toi invincible à tant de maux ; triomphe de la mort, et mets sous tes pieds les enfers comme tu l’as déjà fait.

Hercule

Si j’étais enchaîné sur les roches du Caucase, et livré en proie au vautour dévorant, et que je visse les Scythes pleurer autour de moi, je ne pleurerais pas. Si j’étais pris entre les Symplégades errantes, je souffrirais sans gémir leur entrechoquement terrible. Je me laisserais écraser sous le poids du Pinde, de l’Emus, de l’Athos qui brise les flots de la mer de Thrace, et du Mimas si souvent frappé de la foudre de Jupiter. Quand le monde entier tomberait sur moi, quand le char du Soleil s’abattrait embrasé surina tête, aucune plainte indigne de moi ne m’échapperait. Que mille bêtes féroces m’attaquent et me déchirent à la fois ; que, d’un côté, les oiseaux du Stymphale m’assaillent avec un bruit terrible ; que le taureau menaçant me frappe de toute la force de ses cornes ; que chaque monstre effroyable se multiplie pour me perdre ; que Sinis déchire mes membres attachés