coup. Mais, par l’habitude de se mesurer avec le malheur, l’homme s’endurcit à la souffrance, et devient indomptable ; est-il abattu, il combat encore à genoux.
Vous êtes surpris que Dieu, qui aime les gens de bien, qui veut les élever au plus haut degré de perfection, leur donne ici-bas la fortune pour adversaire. Et moi, je ne suis pas étonné qu’il prenne quelquefois envie aux dieux de voir les grands hommes luttant contre l’adversité. C’est quelquefois un plaisir pour nous de regarder un jeune homme intrépide, qui attend, avec son épieu, une bête féroce, et qui soutient la fureur d’un lion : le plaisir est d’autant plus vif, que le combattant est d’un rang plus illustre.
La Divinité ne daigne point fixer ses yeux sur ces vains amusements de la frivolité humaine. Mais voici un spectacle capable de distraire le souverain de l’univers de ses soins éternels ; voici deux athlètes dignes d’avoir Dieu pour spectateur : 1e grand homme aux prises avec la fortune, surtout quand c’est lui qui l’a provoquée. Non je ne vois dans le monde rien de plus beau à contempler pour Jupiter, s’il veut abaisser vers nous ses regards, que Caton, après le désastre de son parti, seul debout au milieu des ruines de la république. « Que l’empire, dit-il, tombe au pouvoir d’un seul homme ; que la terre soit occupée par ses légions, et la mer par ses vaisseaux ; que les Césariens veillent à nos portes ; Caton sait par où leur échapper : il suffit de mon seul bras pour m’ouvrir le chemin qui mène à la liberté. Ce fer, innocent même dans la guerre civile, et pur de sang romain, va remplir enfin un office utile et glorieux. S’il n’a pu