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Les jours que vous filez ne sont pas d’un mortel :
Il me sera semblable et d’air et de visage,
De la voix et des chants il aura l’avautage.
Des siècles plus heureux renaîtront à sa voix ;
Sa loi fera cesser le silence des lois.
Comme on voit du matin l’étoile radieuse
Annoncer le départ de la nuit ténébreuse ;
Ou tel que le soleil, dissipant les vapeurs,
Rend la lumière au monde et l’allégresse aux cœurs ;
Tel César va paraître ; et la terre éblouie
« A ses premiers rayons est déjà réjouie. »

Ainsi dit Apollon : Lachésis, charmée pour sa part de favoriser un mortel si beau, s’empresse d’obéir. A pleine main, elle ourdit les fils, et de son chef ajoute plusieurs années à Néron. Pour Claude tous décident,

« Avec joie et des cris de jubilation, qu’il soit à l’instant expédié. »

Aussitôt son âme s’échappe comme une bulle d’air, et il cesse de paraître en vie. Il expira en écoutant des comédiens. Aussi tu vois que ce n’est pas sans cause que je crains ces gens-là. La dernière parole qu’il fit entendre parmi les hommes, après avoir émis un son plus bruyant par l’organe dont il parlait le plus volontiers, fut : Malheur à moi ! je me suis embrené. Qu’aurait-il pu faire de mieux ? je ne sais, puisqu’il en fit toujours de même.

V. Ce qui s’est ensuite passé sur terre, il est superflu de le