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un monde inconnu

atteignons la lune sains et saufs, vous me jurez de renoncer à vos projets de suicide.

— Oh ! de très grand cœur, s’écria lord Rodilan, car alors j’aurai retrouvé un intérêt puissant à vivre, et je n’aurai plus de raisons pour renoncer à une existence qui m’apportera tant d’émotions nouvelles et inaccessibles au vulgaire. Mais vous me permettrez, jusqu’à nouvel ordre, de ne voir dans ce second voyage qu’une pure et simple folie à laquelle je ne m’associe que parce que j’y trouve mon compte.

— Eh bien ! messieurs, dit Marcel en se levant, veuillez me suivre jusque chez moi, et si ce que je vais vous montrer ne triomphe pas de votre incrédulité, ce sera à désespérer de la logique humaine. »

En quelques minules on arriva rue Taitbout à la maison où Marcel occupait à l’entresol un petit appartement meublé avec une élégante simplicité. Il les laissa seuls un instant dans le salon, pénétra dans la chambre à coucher contiguë et revint bientôt, portant avec effort une sorte de coffre aux ferrures solides, qu’il déposa soigneusement sur la table.

Les deux compagnons s’étaient levés et regardaient : leur visage offrait l’expression d’une vive curiosité.

Marcel ouvrit le coffre mystérieux et en tira un objet de forme ronde d’environ 20 centimètres de diamètre, de couleur brune et rougeâtre, paraissant d’un poids considérable, et qu’il posa avec respect sur la table.

« Mais c’est là un vulgaire boulet de canon, dit Jacques en riant ; cela date de la prise de Québec par les Anglais.

— Attends, sceptique, tu vas voir », fit Marcel.

Saisissant alors un tournevis qu’il avait apporté en même temps que l’objet singulier qu’il montrait à ses compagnons, il leur fit remarquer deux petites rainures presque imperceptibles ; puis, introduisant son tournevis successivement dans chacune d’elles, il retira deux petites vis finement taraudées et fit tomber une plaque assez épaisse noyée dans la masse du métal. Cette plaque fermait l’orifice d’un trou rectangulaire qui s’enfonçait suivant l’axe du boulet, et à l’aide d’une pince il en retira une