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un monde inconnu

tique d’ingénieur expérimenté, avait tout compris. Nous allons voir se succéder, à la même place, toutes les lettres du premier message échangé entre les deux mondes. »

Aussitôt qu’avait été constatée la présence du rectangle lumineux sur la surface de la Terre, le bruit de cet événement considérable s’était répandu dans l’observatoire tout entier, et le savant Mérovar, qui le dirigeait, s’était empressé d’adresser un avis au chef de l’État lunaire, qui, personne ne l’ignorait, portait un si vif interêt à tout ce qui touchait aux communications interplanétaires.

Discrètement et sans bruit, tous ceux à qui leur rang dans la hiérarchie scientifique le permettait, avaient pénétré dans la salle d’observations, et, depuis l’apparition des premières lettres, manifestaient sur leurs visages un enthousiasme que leur réserve habituelle empêchait seule d’être bruyant.

Les lettres de feu se succédaient de dix minutes en dix minutes, sans solution de continuité. On eût dit que ceux qui les projetaient à travers l’espace, sentant qu’ils ne pouvaient disposer que de quelques heures de nuit, se hâtaient pour pouvoir envoyer à leurs amis une pensée complète. Au bout de soixante-dix minutes, un mot entier avait été transmis : c’était le mot « honneur ».

Mérovar, dès qu’il avait compris qu’il s’agissait cette fois d’un message verbal, avait multiplié les avis adressés au Conseil Suprême, et, à peine le premier mot lancé d’un monde à l’autre était-il arrivé au satellite de la Terre, que ce mot, reproduit par des appareils électriques, s’étalait sous les yeux du Conseil convoqué en toute hâte.

L’émotion était vive, car l’instant était solennel.

Le problème si longtemps cherché par tant de générations, et poursuivi jusque-là au hasard, recevait enfin une éclatante et définitive solution. Aldéovaze voyait remplies les espérances que lui avait fait concevoir l’arrivée des habitants de la Terre, et dont il les avait entretenus avec une si entière confiance. Désormais, les deux planètes sœurs ne tourneraient plus étrangères l’une à l’autre dans leur éternelle orbite. Elles iraient unies par une pensée commune, et l’on pouvait attendre de cette unanimité