gination s’exaltait aux souvenirs de 186., et je ne pouvais m’arracher à l’oculaire du grand télescope. Cet admirable instrument mettait la Lune à une distance bien plus rapprochée que ne l’avaient fait jusqu’ici les plus puissants appareils d’optique.
« J’ai longuement observé notre satellite, et j’ai pu rectifier en bon nombre de ses parties la carte de Beer et Madler, qui passait jusqu’alors pour la plus complète et la plus exacte. J’ai pu faire des constatations nouvelles qui me semblent présenter tous les caractères d’une entière certitude. C’est ainsi que j’ai pu établir que les derniers astronomes qui ont écrit sur la Lune se sont trompés, lorsqu’ils ont constaté à sa surface la présence d’une certaine quantité d’eau. Il est maintenant établi pour moi que ce n’est pas de l’eau, mais de l’air, qu’ils ont vu ; c’est ce que l’on peut induire de l’aspect que présentent certains contours et certaines arêtes légèrement estompées des extrémités du croissant lunaire. Pour moi les grandes dépressions qui existent à la surface de notre satellite, telles que celle qu’on appelle la mer du Froid, renferment dans leurs parties les plus basses une couche d’air dont l’épaisseur est sans doute excessivement faible, mais suffisante à mon avis pour entretenir, au moins dans ces régions, la vie d’êtres animés. Et puis, qui sait ? Dans la rapide éclaircie qui leur a permis d’entrevoir la portion du disque de la Lune toujours invisible pour nous, les voyageurs du Gun-Club n’ont-ils pas cru apercevoir des eaux, des montagnes boisées, de profondes forêts ? Les lueurs fulgurantes du bolide qui a failli les pulvériser ne se sont-elles pas réfléchies sur la surface de vastes océans ? Cela se trouverait d’accord avec l’hypothèse de quelques astronomes, qui soutiennent que ce qui reste de l’atmosphère lunaire a pu se condenser sur la partie invisible de son disque. Ce sera, du reste, un point à vérifier. Bref, je sentais grandir en moi le désir d’accomplir ce qu’avaient tenté les Américains avec l’espoir que, cette fois, aucun malencontreux bolide ne viendrait me faire dévier de la route et m’empêcher d’atteindre le but.
« Un événement imprévu vint hâter ma résolution.
« J’avais pour aide dans mes travaux un Anglais, John Parker, en qui je mettais toute ma confiance. Ingénieux et adroit, fertile