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tu t’asseyais au pied de ce pommier en fleurs, pendant que je grimperais dessus pour enlever du gui qui fait mourir les branches ?

juliette.

Je ne demande pas mieux ; mais ne va pas tomber sur moi quand tu seras là-haut. »

Juliette s’assit, Charles grimpa comme un chat jusqu’aux branches qu’il voulait débarrasser du gui qui les obstruait, fit très habilement son travail, et descendit aussi lestement qu’il était monté. Il ne s’aperçut pas qu’un objet assez volumineux tombait de sa poche, et que cet objet était la clef du palais des lapins.

Il reprit avec Juliette le chemin de la ferme ; la conversation ne tarit pas plus en revenant qu’en allant. Charles la termina en disant qu’« ils étaient plus heureux que tous les rois de la terre ».

« Je le crois bien, dit Juliette : les rois et les princes sont les plus malheureux êtres de leurs royaumes.

charles.

C’est beaucoup dire ; ils sont ennuyés et contrariés souvent, mais ils ne sont pas malheureux.

juliette, avec véhémence.

Pas malheureux ! Contrariés du matin au soir dans leurs goûts, dans leurs affections, dans leurs volontés ! Quand ils sont enfants et jeunes, ils se promènent seuls, ils jouent seuls ; ils ne sortent qu’en voiture ; ils sont gênés dans leurs habits élégants ; ils saluent à droite et à gauche sans arrêter ;