Page:Ségur - Un bon petit diable.djvu/168

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Betty qui devait apporter la soupe à la table des oppresseurs (c’est ainsi que les avaient surnommés les enfants). Dans le corridor qui précédait la salle à manger et que devait suivre Betty, on entendit un grand cri, puis un second. Un des maîtres allait se lever pour voir d’où provenaient ces cris, lorsque Betty entra, tremblante, haletante : elle tenait dans les mains la soupière destinée à assouvir la faim des maîtres, mais elle tremblait si fort, qu’en la passant au-dessus de M. Old Nick aîné, elle en répandit sur sa tête et sur son visage. Old Nick cria à son tour ; il avait la figure échaudée ; il tempêtait, menaçait.

« Pardon, Monsieur, pardon, mon respectable maître, dit Betty d’une voix chevrotante en plaçant la soupière sur la table ; j’ai eu si peur dans le corridor !

— Peur de quoi, sotte ? répliqua Old Nick. Quand même vous auriez vu le diable, ce n’est pas une raison pour m’échauder la tête et la figure ! Je ne suis pas une tête de veau, je suppose !

betty.

Oh ! Monsieur ne croit pas si bien dire !

m. old nick.

Comment, insolente ? Vous osez me traiter de tête de veau ?

betty, avec indignation.

Jamais, Monsieur ! jamais un veau et Monsieur ne se sont accordés dans ma pensée. Non, non, je répondais à ce que Monsieur me disait du diable. C’est que c’est tout juste lui que j’ai vu. Un grand