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repoussant l’Église et le Christ, périra éternellement. Voilà la doctrine catholique ; ce que disent aujourd’hui comme hier, au nord et au midi, à l’orient et à l’occident, ses papes, ses évêques, ses docteurs, ses prêtres, ses fidèles, ses néophytes : idées fondamentales aussi bien qu’immuables, parce qu’elles décident de toute la direction active des intelligences qui en font profession. Trouvez-moi, maintenant, une éclipse à cette immutabilité ; trouvez-moi une page catholique où ce dogme soit nié en tout ou en partie ; trouvez-moi un homme qui, s’en étant écarté, n’ait pas été à l’instant chassé de l’Église, eût-il été le plus éloquent des écrivains, comme Tertullien, ou le plus élevé des évêques, comme Nestorius, ou le plus puissant des empereurs, comme Constance et Valons. Trouvez-moi un homme à qui la pourpre, ou le génie, ou la sainteté, ait servi contre les anathèmes de l’Église, une fois qu’il a eu touché par l’hérésie à la robe sans couture du Christ.

« Certes, le désir n’a pas manqué de nous prendre ou de nous mettre en faute contre l’immutabilité car, quel privilège pesant à tous ceux qui ne l’ont pas ! Une doctrine que des hommes tiennent dans leurs mains ; que de pauvres vieillards, dans un endroit qu’on appelle le Vatican, gardent sous la clef de leur cabinet, et qui, sans autre défense, résiste au cours du temps, aux rêves des sages, aux plans des rois, à la chute des empires, toujours une, constante, identique à elle-même ! Quel prodiges démentir ! quelle accusation à faire taire ! Aussi tous les siècles, jaloux d’une gloire qui dédaigne la leur, s’y sont-ils essayés. Ils sont venus tour à tour à la porte du Vatican ; ils ont frappé du cothurne ou de la botte ; la doctrine est sortie sous la forme frêle et usée de quelque septuagénaire ; elle a dit :

« Que me voulez-vous ? – Du changement. — Je ne