arriva au relais d’une prélature. Je tus déposé devant un mandarin, qui, s’étant enquis des officiers, commença, avant tout, par me dire de chanter, parce que mon talent en ce genre était déjà renommé. J’eus beau m’excuser sur ce que j’étais à jeun, il fallut chanter. Je déroulai donc toute l’étendue de ma belle voix, desséchée par une espèce de jeûne de deux jours et demi, et leur chantai ce que je pus me rappeler des vieux cantiques de Montmorillon. Tous les soldats étaient alentour, et un peuple nombreux se fût précipité vers la cage, sans la verge en activité de service. Dès ce moment, mon rôle changea : je devins un oiseau précieux pur son beau ramage. Après cela on me donna à manger.
«… Le lendemain de mon arrivée au chef-lieu du gouvernement, le colonel Taï, qui m’avait pris, vint, accompagné d’une foule de curieux, et, me montrant une petite croix dorée dont quelques ornements lui faisaient méconnaître la figure, il voulut en avoir l’explication. Je le priai de me la remettre, et, la suspendant à ma cage, le Christ tourné vers ceux qui l’accompagnaient, je les forçai à voir, au moins un instant, Jésus dominer sur eux. »
Ingénieuse et touchante inspiration de l’amour ! Spectacle attendrissant que celui de ce captif de Jésus-Christ faisant servir sa captivité même à la gloire de son divin Maître !
« Dans toutes les visites que je reçois, ajoute le missionnaire, une des questions ordinaires que me font les curieux est de me demander si j’ai une femme et des enfants. Je leur réponds bien vite que non, et je leur explique la cause et l’utilité de cette privation, ce qui ne laisse pas que d’être bien compris de mes auditeurs. »
M. Cornay termine cette relation, adressée à sa famille, et que j’aurais voulu pouvoir citer tout entière, par ces touchantes paroles :