Un crucifix était à terre : M. Charrier reçoit l’ordre de passer dessus ; il le prend, le baise et l’adore en disant « Voici l’image de mon Dieu, du Dieu pour lequel j’ai travaillé toute ma vie, en qui seul je mets ma confiance, et maintenant je l’abandonnerais ! Non, non, jamais ! » On ordonne alors trois satellites de faire marcher l’accusé sur la croix comme ils ne peuvent y réussir, ils l’enlèvent en l’air, afin de le porter sur l’instrument de notre salut mais plus ils rabaissent son corps pour que ses pieds foulent la croix, plus il les retire, en même temps que sa bouche confesse solennellement la divinité de Jésus-Christ. Vaincus de ce côté, les gardes lui attachent fortement le crucifix sous le pied droit, et veulent le forcer à se lever, pour qu’il soit dit qu’il ait marché dessus. M. Charrier, demeurant toujours assis, prend son pied, baise la croix et publie hautement que Jésus-Christ est Dieu. Alors on invente d’autres profanations contre lesquelles le généreux confesseur ne peut que protester, et dont il se venge en embrassant l’image de son Sauveur avec une plus vive expression d’amour. « C’est votre œuvre, disait-il aux mandarins, et non la mienne ; vos outrages ne m’empêcheront pas de vénérer mon Dieu crucifié. »
« Les mandarins comprirent enfin que la foi du missionnaire était au-dessus de leurs efforts : ils reprirent, toujours avec menaces, leurs questions sur les lieux qui lui avaient servi de retraite, sur les personnes qui lui avaient donné asile, et n’obtinrent qu’un nouveau refus. Alors on étend M. Charrier par terre, on l’attache au fatal piquet, on lui assène onze coups de rotin (c’était la seconde fois qu’il subissait ce supplice), dans l’intervalle desquels les juges lui répètent : « Eh bien ! maintenant, ne parlerez-vous pas ? — Si vous avez pitié de moi, je vous en rendrai grâce, si vous me torturez encore, je le supporterai avec résignation ; mais, pour dire un seul mot