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chez M. et Mme de Gerville, il s’occupait exclusivement de Giselle, lui parlait de ses terres, de ses bijoux, de la vie animée qu’il comptait faire mener à sa femme :

« Si je me marie, disait-il, ma femme n’aura rien à désirer, car elle aura tout ce qu’une femme peut posséder ; ses volontés seront les miennes ; je réglerai ma vie sur ses goûts ; elle sera la maîtresse souveraine de ma demeure, et je ne serai que son esclave dévoué. »

Cette perspective séduisait Giselle ; elle comparait la galanterie empressée du duc avec la sage réserve de Julien ; sa vanité plaidait pour le duc, sa raison et son cœur parlaient pour Julien ; mais, à la longue, la vanité l’emporta sur le peu de cœur qu’avait conservé Giselle, et un jour que le duc lui avait parlé ouvertement et qu’il l’avait pressée très vivement de se décider, elle lui fit entendre que sa décision était déjà prise en sa faveur.

La joie du duc fut aussi insensée que sa passion ; il obtint l’autorisation de faire sa demande en forme, il lui passa au doigt une bague avec un rubis magnifique entouré de diamants ; et quand Julien vint faire le lendemain à Giselle une visite inaccoutumée à une heure matinale, elle lui dit avec embarras :