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« Pauvre Ourson, dit-elle, qui pourra t’aimer assez pour te délivrer de ces affreux poils ? Ah ! que ne puis-je faire l’échange que permet la fée à celui ou à celle qui t’aimera ? Personne ne pourra t’aimer plus que je ne t’aime ! »

Ourson ne répondit rien, car il dormait.

Passerose pleurait aussi pour tenir compagnie à Agnella, mais elle n’avait pas coutume de s’affliger longtemps ; elle s’essuya les yeux et dit à Agnella :

« Chère reine, je suis si certaine que votre fils ne gardera pas longtemps sa vilaine peau d’ours, que je vais l’appeler dès aujourd’hui le prince Merveilleux.

— Garde-t’en bien, ma fille, répliqua vivement la reine, tu sais que les fées aiment à être obéies. »

Passerose prit l’enfant, l’enveloppa avec les langes qui avaient été préparés, et se baissa pour l’embrasser ; elle se piqua les lèvres aux poils d’Ourson et se redressa précipitamment.

« Ça ne sera pas moi qui t’embrasserai souvent, mon garçon, murmura-t-elle à mi-voix. Tu piques comme un vrai hérisson ! »

Ce fut pourtant Passerose qui fut chargée par Agnella d’avoir soin du petit Ourson. Il n’avait de l’ours que la peau : c’était l’enfant le plus doux, le plus sage, le plus affectueux qu’on pût voir. Aussi Passerose ne tarda-t-elle pas à l’aimer tendrement.

À mesure qu’Ourson grandissait, on lui permettait de s’éloigner de la ferme ; il ne courait aucun danger car on le connaissait dans le pays ; les