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Camille.

Mettons-nous à table ; nous écouterons en mangeant ; je meurs de faim.

Ils se placèrent sur l’herbe, autour de la nappe ; Camille servit l’omelette, qui fut trouvée excellente ; Élisabeth servit à son tour ses côtelettes ; elles étaient très bonnes, mais un peu trop cuites. Le reste du déjeuner vint ensuite. Pendant qu’on mangeait, Auguste raconta ce qui suit :

« À peine étiez-vous partis, que je vis accourir les deux gros chiens de la ferme, attirés par l’odeur du repas ; je ramassai un bâton, et je crus les faire partir en le brandissant devant eux. Mais ils voyaient les côtelettes, l’omelette, le pain, le beurre, la crème ; au lieu d’avoir peur de mon bâton, ils voulurent se jeter sur moi ; je lançai le bâton à la tête du plus gros, qui sauta sur mon dos…

— Comment, sur ton dos ? dit Henri; il avait donc tourné autour de toi ?

— Non, répondit Auguste en rougissant ; mais j’avais jeté mon bâton, je n’avais plus rien pour me défendre, et tu comprends qu’il était inutile que je me fisse dévorer par des chiens affamés.

— Je comprends, reprit Henri d’un ton moqueur ; c’est toi qui avais tourné les talons et qui te sauvais.

— Je m’en allais pour vous chercher, dit Auguste ; les maudites bêtes coururent après moi, lorsque Cadichon vint à mon secours en saisissant