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la bonne y avait mis pour son goûter, il me le présenta.

J’avais été offensé de la mauvaise pensée de la bonne, et je fus bien aise de lui prouver qu’elle m’avait mal jugé, que ce n’était pas par intérêt que je suivais Jacques, et que je portais Jeanne sur mon dos par complaisance, par bonté.

Je refusai donc le pain que m’offrait le bon petit Jacques et je me contentai de lui lécher la main.

Jacques.

Ma bonne, ma bonne, il me baise la main, s’écria Jacques ; il ne veut pas de mon pain ! Mon cher petit Cadichon, comme je t’aime ! Vous voyez bien, ma bonne, qu’il me suit parce qu’il m’aime, ce n’est pas pour avoir du pain.

La bonne.

Tant mieux pour toi si tu crois avoir un âne comme on n’en voit pas, un âne modèle. Moi, je sais que les ânes sont tous entêtés et méchants, je ne les aime pas.

Jacques.

Oh ! ma bonne, le pauvre Cadichon n’est pas méchant, voyez comme il est bon pour moi.

La bonne.

Nous verrons bien si cela durera.

— N’est-ce pas, mon Cadichon, que tu seras toujours bon pour moi et pour Jeanne, dit le petit Jacques en me caressant.

Je me tournai vers lui et le regardai d’un air si