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LES VACANCES

qui paraissait être leur chef ou leur roi. Tous les autres le traitaient avec respect, n’osant pas l’approcher de trop près et lui parlant la tête baissée. Quand il fut à cent pas de nous, il dit quelques mots à deux sauvages, qui vinrent à nous et nous firent signe d’approcher du roi. « Allons, dit mon père en souriant. Aussi bien, nous avons besoin d’eux pour avoir de quoi manger et de quoi nous loger. » Je n’avais pas peur, car je voyais près du roi deux petits garçons à peu près de mon âge. Nous nous avançâmes ; les deux petits garçons accoururent et tournèrent autour de moi en touchant ma veste, mon pantalon, mes pieds, mes mains ; ils faisaient de si drôles de mines et des gambades si étonnantes, que je me mis à rire ; ils eurent l’air enchanté de me voir rire ; ils baisèrent leurs mains et me touchèrent les joues ; je leur en fis autant ; alors leur joie fut extrême ; ils coururent au roi, lui parlèrent avec volubilité, revinrent à moi en courant et me prenant chacun par une main, ils m’entraînèrent vers lui. J’entendis mon pauvre père appeler d’une voix altérée : « Paul, Paul, reviens. » Mais je ne pouvais plus revenir ; les petits sauvages m’entraînaient en répétant Tchihan, tchihane poundi[1]. Le roi me

  1. Viens, viens vite.