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LES VACANCES

pas, restons tranquilles pour leur échapper. Pendant que je te garderai, le Normand va tâcher de les reconnaître ; il saura bien de quelle tribu ils sont, et s’il faut les fuir ou nous montrer. » Pendant que le commandant parlait, je vis le Normand se mettre à plat ventre et se traîner ainsi dans le fourré en prenant les plus grandes précautions pour ne pas faire de bruit et pour ne pas être vu. Il rampa hors du bois ; mais, avant de sortir du fourré, il coupa des branches et des ronces et les piqua à l’entrée de notre allée pour la bien cacher à la vue des sauvages. Mon père me fit quitter la cabane et me traîna avec lui dans un massif de jeunes cocotiers ; à mesure que nous passions, il avait soin de relever les branches et les herbes foulées par nous, pour enlever toute trace de notre passage. Peu de temps après le départ du Normand, nous entendîmes les sauvages courir de côté et d’autre, et s’appeler entre eux ; le bruit approchait ; je me tenais tremblant tout près de mon père, qui me serrait contre son cœur et me faisait signe de me taire.

Un cri général des sauvages nous fit voir qu’ils avaient découvert notre allée ; l’instant d’après, ils se précipitaient dans la salle que mon pauvre père avait faite avec tant de peine. Je crus voir sur son visage une vive inquiétude ; le Normand ne