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Et il alla vers son armoire, l’ouvrit ; Bijou en sortit tout joyeux.

En le voyant si noir et si laid, Sophie se mit à rire, Arthur lui-même ne put s’empêcher de sourire : Léonce seul resta sérieux et pensif.

Sophie.

Tu ne le trouves pas drôle et affreux ?

Léonce.

Affreux, oui ; mais drôle, non ; car je pense que c’est moi qui suis cause de sa laideur.

— Viens, mon pauvre Bijou, viens dire bonjour à ton nouveau maître, dit Sophie en menant Bijou vers Léonce. N’aie pas peur ; il ne te fera pas de mal.

Le pauvre chien, sans rancune, vint lécher la main que lui tendait son ancien ennemi. Léonce, touché de cette caresse, le prit dans ses bras, l’embrassa à plusieurs reprises et lui promit un des petits gâteaux ou biscuits qu’il devait avoir pour son dessert.

Depuis ce temps, Léonce devint l’ami et le protecteur de Bijou, et l’ami le plus dévoué de Sophie et d’Arthur ; aux Tuileries il ne songeait qu’à les protéger contre les exigences et les vivacités de leurs camarades plus âgés ; plus d’une fois il soutint des combats pour les défendre ; un jour il ne craignit pas d’attaquer un grand et gros garçon de douze ans qui voulait, par pur caprice, mettre Arthur hors du jeu. Léonce combattit si vaillamment, que les autres garçons, qui avaient commencé par rire et regarder la bataille, s’indignèrent de