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manière de voyager en croupe lui faisait une peur affreuse, mais il n’y avait pas d’autre moyen de salut ; les assassins pouvaient revenir avec des amis et les égorger tous ; elle consentit donc à monter en croupe derrière Fritz. Pulchérie voulut crier, se débattre ; ma tante lui dit qu’on la laisserait là si elle faisait perdre du temps avec ses sottes peurs ; elle ne se débattit plus et se plaça sur le cheval comme si elle n’avait fait autre chose toute sa vie. On partit au galop, et on arriva au petit jour à Bamberg. Les gens qui les voyaient passer riaient et s’étonnaient de voir une dame en robe de soie et en manteau de velours en croupe derrière un homme en livrée, et suivie d’une autre femme également en croupe derrière un postillon. Au premier groupe qu’ils rencontrèrent, Fritz demanda où il fallait aller pour faire une déclaration de vol et de meurtre. L’étonnement des bonnes gens redoubla, et après quelques interrogations ils indiquèrent une maison qui était sur la grande place. Quand ma tante arriva, Fritz fit garder les chevaux par le postillon, et ils entrèrent tous chez le bourgmeister, auquel ma tante raconta en bon allemand (car elle parlait très bien l’allemand) ce qui lui était arrivé. Pulchérie confirma le récit de sa maîtresse ; Fritz dit ce qu’il avait vu avec le postillon. Le bourgmeister parut fort étonné de ce récit ; il demanda à ma tante son nom pour faire une enquête.

« La princesse de Guéménée », répondit-elle.