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les jambes, sautaient aux mollets, tiraient par derrière. Les grands forçaient les retranchements, pénétraient jusqu’à Sophie, dont ils se retrouvaient séparés par la masse des petits, qui se coulaient partout. Enfin, Léonce parvint à saisir une main de Sophie, Camille attrapa ses jupes, et, tirant, poussant, riant, criant, aidés de Pierre qui faisait l’avant-garde, de Louis qui était à l’arrière-garde, ils parvinrent à la dégager et à l’emmener en triomphe. Quelqu’un qui serait entré dans le salon en ce moment aurait cru à une bataille sérieuse, tant les cheveux étaient épars, les habits, les robes en désordre : l’un avait perdu sa cravate, l’autre son peigne ; un troisième n’avait plus de boutons à son gilet, une quatrième avait une queue à sa jupe arrachée dans toute sa largeur ; celui-ci cherchait son soulier, celle-là son col ; tous étaient rouges et suants.

C’est au beau milieu de ce désordre que la porte s’ouvrit et que Mme de Rouville fit entrer de nouveaux voisins, qui étaient venus faire une visite et qui désiraient faire connaissance avec les enfants.

Mme de Rouville fut interdite à l’aspect général des enfants.

« Qu’y a-t-il donc ? Qu’arrive-t-il, mes enfants, pour que vous soyez dans cet état ? Où est Camille ? »

Mme de Rouville espérait que Camille au moins serait présentable. Camille avança, les cheveux épars, une manche déchirée, le visage suant, et fort embarrassée de sa personne.