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avait fait les ouvertures petites et très hautes pour que les loups ne pussent pas y pénétrer. Quand toute la famille fut un peu remise de sa frayeur, tous se jetèrent à genoux pour remercier Dieu de les avoir sauvés ; ensuite le maître embrassa Nikita et lui dit avec émotion :

« Mon ami, c’est toi après Dieu qui nous a sauvés. Et si Dieu permet que nous sortions vivants d’ici, je te donnerai ta liberté et je te ferai une pension pour que tu puisses vivre sans servir. »

Nikita se mit à genoux, baisa la main de son maître, essuya ses yeux du revers de sa main et alla vers ses chevaux pour les dételer et les arranger. Les pauvres bêtes étaient encore tremblantes de la frayeur que leur causaient les hurlements des loups, de la vitesse de leur course et de la violence de leur chute. Pendant que Nikita arrangeait la litière des chevaux avec la paille qui était entassée dans un coin, M. Bogoslafe faisait sortir sa femme et ses enfants de la voiture, dans laquelle ils avaient voulu remonter, s’y croyant plus en sûreté contre les loups.

« Examinez bien cette grange, leur dit-il, et voyez comme elle est solidement bâtie : les loups ont beau gratter et sauter, ils ne peuvent y faire de trou. »

Mme Bogoslafe et ses enfants se laissèrent enfin persuader, et firent le tour de la grange pour s’assurer qu’il n’y avait aucun passage possible pour les loups.