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« Je te donne le nom d’Insatiable et je t’accorde le don de réussir dans tout ce que tu entreprendras, d’obtenir tout ce que tu désireras…

— Excepté si son désir est injuste ou cruel, ma sœur, dit la fée Bonsens, qui parut tout à coup, et seulement jusqu’à quinze ans. Je corrige ainsi le mal que vous lui faites et qu’elle pourrait faire à d’autres. Quant à toi, enfant, ajouta la fée Bonsens en s’adressant à l’autre petite fille, je te donne le nom de Modeste et je te doue d’une grande sagesse et de ne jamais désirer que ce qui est juste et raisonnable. Je veillerai sur elle, ajouta la fée, et voici mon présent de marraine pour ma filleule. »

Elle présenta à la reine un miroir encadré d’or, de diamants et de rubis.

« Toute personne qui regardera dans cette glace, dit-elle, y verra comment elle doit agir, le mal qu’elle a fait et le bien qu’elle peut faire. »

La reine saisit le miroir, s’y regarda un instant, rougit, le rendit à la fée d’un air de dépit, et lui demanda de le serrer jusqu’à ce que Modeste fût assez grande pour s’en servir.

La fée sourit en reprenant le miroir, et le déposa dans une cassette dont elle confia la clef à la reine.

La fée Prodigue était contrariée de l’arrivée de sa sœur et mécontente de l’empêchement qu’elle avait mis, dans l’avenir, aux désirs de sa filleule Insatiable. Celle-ci ne tarda pas à faire voir qu’elle mériterait le nom que lui avait donné sa marraine,