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cousine de la fureur des gens rassemblés devant la porte ; il la fit passer dans la chambre à côté, ouvrit une trappe qui menait à la cave, l’y fit descendre, referma la trappe, jeta dessus du linge qu’il tira d’une armoire, et rentra promptement dans la première chambre, au moment où la foule brisait la porte et entrait dans la maison avec Esbrouffe en tête.

« Où est la sorcière ? crièrent-ils tout d’une voix.

— De quelle sorcière parlez-vous, mes amis ? où donc est-elle ? Pour moi, je n’en connais pas dans le pays.

— Il y en a une, c’est votre cousine, nous la voulons pour la brûler sur la place.

— Et vous pouvez croire un mensonge pareil ? Lequel de vous a souffert de ma cousine ? Vous a-t-elle jamais fait le moindre mal ? N’a-t-elle pas, au contraire, toujours cherché à vous rendre service ? N’est-elle pas une fille pieuse, allant à l’église et priant avec vous tous ? Vous voyez bien qu’on vous a trompés, qu’on s’est moqué de vous, et qu’on vous a fait sortir si matin de chez vous et dérangés de vos travaux par pure méchanceté.

— C’est vrai cela. Une sorcière ne se conduit pas comme Lamalice.

— Une sorcière ne prie pas, ne va pas à l’église.

— Une sorcière a l’air sournois et méchant ; Lamalice a un visage gai et aimable.

— D’ailleurs on n’a jamais vu une sorcière de dix ans. Ce sont de vieilles femmes qui se font sorcières.